Nous vivons dans une société de moins en moins permissive, caractérisée par une inflation des normes et de plus en plus d’interdits, gagnée par les communautarismes – il convient de ne choquer personne – et où chaque politique ayant une idée, née souvent d’un bon sentiment, ne résiste pas à l’accompagner d’un système contraignant dangereux pour les libertés individuelles, ce qui est davantage l’apanage des régimes autoritaires que des démocraties. La publicité subit de plein fouet cette tendance dans bien des secteurs. L’alimentaire, par exemple, est de plus en plus bardé d’interdictions, au niveau européen, national et même local, le Conseil municipal de Paris demandant l’interdiction absolue dans le métro des publicités sur les aliments sucrés, salés et gras.
La poussée des écologistes aux élections européennes ne doit pas être un blanc-seing pour imposer encore plus d’interdits. Au risque de le payer très cher, faisons attention à ne pas déconstruire des pans entiers de l’économie – ce qui pourrait bien arriver à l’automobile, à l’énergie, etc – sans avoir bâti une économie de remplacement. L’idéologie de la décroissance a ses limites !
Il a été démontré dans nombre de pays, sur les différents continents, que la publicité est l’un des moteurs de l’expansion économique et de l’emploi. Elle permet la diffusion des innovations, faisant connaitre les produits et services, améliorant leur commercialisation et leur distribution ainsi que l’information des consommateurs et citoyens.
Elle participe également à la vie démocratique en contribuant au financement des médias et à les rendant accessibles au plus grand nombre. Même si parfois, la publicité irrite, est considérée comme trop intrusive, je m’inquiète d’une tendance à la rejeter dans sa totalité.
Une complémentarité naturelle entre la loi et l’autorégulation professionnelle de la publicité
L’autorégulation professionnelle de la publicité contribue à l’amélioration et au perfectionnement de l’activité de la communication en respectant un fragile équilibre entre la liberté de création et le respect du consommateur, du citoyen. Elle s’inscrit dans un cadre européen et mondial. Le secteur de la communication est l’un des rares systèmes économiques à pouvoir se prévaloir d’une organisation éthique développée en France depuis 1935 et largement ouverte sur la société depuis la création de l’ARPP, il y a dix ans.
J’invite nos dirigeants actuels et particulièrement les nouveaux venus dans la vie publique à jouer naturellement la complémentarité de la loi et de l’autorégulation professionnelle de la publicité. Le sens de l’histoire est celui d’une exigence accrue de la démarche responsable des professionnels sur des thématiques qui dépassent les frontières : protection des données personnelles, image et respect de la personne – notamment à propos des stéréotypes féminins – développement durable, etc. L’ARPP, de même que l’Alliance européenne pour l’éthique en publicité (AEEP, en anglais EASA) ont mis en place des règles déontologiques qui couvrent globalement l’ensemble des sujets de préoccupation des consommateurs comme des Pouvoirs publics et s’inscrivent dans des Chartes signées de longue date avec ces derniers.
J’invite donc le législateur à rechercher, avant toute tentation facile de tout réglementer sans en mesurer les impacts et la bonne proportionnalité, les solutions mises en place dans l’autorégulation professionnelle, dont les règles peuvent intégrer, si nécessaire, facilement et rapidement, toute thématique nouvelle (après écoute de toutes les parties prenantes au sein du Conseil Paritaire de la Publicité).
J’invite également nos politiques à ne pas succomber à la pression de ceux qui rêvent d’une supra-régulation qui viendrait ajouter un nouvel outil normatif. Tout système extérieur aux acteurs de la publicité, qui dans leur diversité (annonceurs, agences, médias) et malgré leurs intérêts parfois divergents, ont su se mettre ensemble pour établir et faire respecter ces règles d’éthique applicables par tous, risque d’être moins efficace, très coûteux et encore plus contraignant, certes pour les parties prenantes mais également pour les citoyens auxquels on a de plus en plus tendance à dire ce qu’ils doivent faire, consommer, et demain penser ? Il est toujours difficile de savoir jusqu’où ne pas aller trop loin… C’est pour nous un point de vigilance.
Nous sommes conscients que cette pratique historique d’autorégulation gagnerait à être mieux connue et renforcée, même si cette reconnaissance a déjà beaucoup progressé. C’est pourquoi j’invite l’ensemble des acteurs de la communication publicitaire à s’investir, à hauteur de ses capacités, dans cette démarche collective d’autorégulation professionnelle de la publicité pour défendre la liberté d’entreprendre dans le cadre de messages créatifs et respectueux.
Consultez le rapport annuel 2018 de l’ARPP
Paris, le 28 juin 2019