« Le discours scientifique en publicité : communication ou mystification ? » - Le CEP alerte sur l’usage abusif de la science en publicité

Communiqués de presse

Le Conseil de l’Éthique Publicitaire (CEP) publie aujourd’hui son 40ᵉ avis, intitulé « Le discours scientifique en publicité : communication ou mystification ? ». Cet avis interroge l’utilisation parfois abusive de concepts et de mécanismes scientifiques dans la communication publicitaire, soulignant les risques de tromperie pour les consommateurs et les conséquences sur la confiance envers les entreprises et la publicité en général. Le CEP s’inquiète enfin de leur effet sur la perception des phénomènes scientifiques, aujourd’hui objet de spéculations parfois hasardeuses dans une partie du corps social.

Un phénomène en expansion : quand la publicité détourne la science

La publicité a toujours puisé dans le langage et les imaginaires scientifiques pour renforcer la crédibilité des produits. Cependant, comme le relève le CEP, cette tendance prend aujourd’hui une dimension nouvelle et préoccupante : certains discours publicitaires basculent vers la mystification, notamment en manipulant ou en détournant des concepts scientifiques complexes (épigénétique, neurosciences, physique quantique, IA).

« Le recours à des termes scientifiques abstraits, l’évocation de processus inintelligibles pour le grand public, et l’instrumentalisation de l’innovation technique peuvent relever de la tromperie », alerte le CEP.

Les dérives identifiées par le CEP

Le CEP met en lumière plusieurs pratiques problématiques :

  • Confusion entre constats objectifs et perceptions subjectives : certaines publicités mêlent données scientifiques et ressenti consommateur, créant une ambiguïté trompeuse.
  • Utilisation de termes obscurs : des expressions comme « crème neuro-modulatrice », « sérum épigénétique » ou « effet anti-exposome » donnent une illusion de rigueur scientifique, sans fondement réel.
  • Raccourcis et inférences abusives : absence de démonstration quant à l’intervention des phénomènes évoqués.
  • Confusion entre corrélation et causalité : des allégations comme « réactiver les gènes de jeunesse » ou « inverser le vieillissement » sont scientifiquement infondées.

Le CEP identifie trois enjeux critiques :

  1. Respect des consommateurs et surtout des consommatrices : Les femmes, particulièrement ciblées par ces discours, sont exposées à une tromperie subtile. « Moins visible que l’atteinte à leur dignité via la représentation gratuite de leur corps, l’insulte à leur intelligence n’est pas plus acceptable », souligne le CEP.
  2. Crédibilité de la science : À l’heure où le scientoscepticisme gagne du terrain, le détournement de concepts scientifiques en publicité pourrait aggraver la défiance envers la recherche. « Manipuler des théories complexes comme l’épigénétique ou les neurosciences nourrit les théories alternatives et discrédite la science », avertit le CEP.
  3. Confiance dans la publicité : Ces pratiques menacent la crédibilité des marques et de la publicité en général. « Le rôle de l’autodiscipline publicitaire est précisément d’éviter cet écueil », rappelle le CEP.

Un phénomène qui s’étend au-delà de la cosmétique

Si le secteur de la cosmétique est aujourd’hui le plus concerné par ces dérives, le CEP observe que cette tendance pourrait gagner d’autres domaines, comme le bien-être, l’alimentation ou l’industrie textile. « Certains acteurs détournent des phénomènes scientifiques pour cibler les femmes avec des promesses de jeunesse éternelle. Ce phénomène s’étend progressivement à d’autres catégories de produits et de personnes : les hommes, les seniors, et peut-être bientôt une partie de la jeunesse », souligne Dominique Wolton (CNRS), président du CEP.

Un travail rigoureux et collaboratif

Cet avis, piloté et rédigé par Pascale Marie, Zysla Belliat et Sylvie Dubois (co-rapporteuses) et coordonné par Bertrand Espitalier, est le fruit d’un travail de huit mois. Le groupe de travail s’est appuyé sur :

  • L’analyse de publicités (TV, presse, sites et réseaux sociaux).
  • L’audition d’experts scientifiques (CNRS, Institut Pasteur), de psychiatres, d’historiens et de professionnels du secteur.

L’avis a été discuté et validé par le CEP lors de sa séance du 17 octobre 2025.


Pour aller plus loin

Téléchargez l’avis du CEP « Le discours scientifique en publicité : communication ou mystification ?», repris dans le livre anniversaire « 20 ans d’Avis » publié le 26 novembre dernier et disponible dans le 10e volume des Cahiers du CEP à paraître prochainement (www.cep-pub.org/actualite/categorie/les-cahiers-du-cep/)

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Paris, le 11 décembre 2025