Communiquer sur les Objectifs de Développement Durable sans tomber dans l’ « ODD washing » : l’analyse d’Émilie le Gall, Responsable des actions RSE et Développement durable, Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP)
Le baromètre de 2022 montre que la communi- cation autour des ODD constitue d’abord un enjeu majeur notamment en interne. Comment faire pour que la communication des entreprises autour des ODD puisse aussi toucher le grand public ?
Les Objectifs de Développement Durable offrent un véritable cadre structurant pour toute entreprise ou organisation qui souhaiterait s’engager dans une démarche RSE ou encore la mettre en œuvre.
Communiquer autour des ODD constitue ainsi, et avant tout, un enjeu majeur en interne : chaque collaborateur doit pouvoir s’en saisir et participer à leur rayonnement auprès des parties prenantes internes et externes.
Une fois les actions destinées à atteindre les ODD effectivement mises en place, et dont on peut déjà mesurer les premiers effets, l’entreprise ou l’organisation doit alors commencer à les mettre en valeur auprès du grand public, en expliquant avec clarté et justesse ces actions et pourquoi ces dernières ont permis d’atteindre l’ODD visé.
Le rôle de son agence de communication est alors primordial : proposer à son client de nouveaux récits destinés à investir les imaginaires au service des ODD, et donc de la transition écologique et sociétale, tout en veillant à leur conformité au regard des règles juridiques et déontologiques en vigueur avant diffusion. Prendre conseil auprès de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) peut ainsi s’avérer être une étape cruciale.
Est-ce que l’aspect systémique et complexe des ODD est un frein en termes de communication pour les entreprises vis-à-vis de leurs parties prenantes et consommateurs ?
Il est vrai que certains ODD peuvent, à première vue, souffrir d’un manque de clarté, ou sembler trop éloignés de l’activité opérationnelle.
Une entreprise ou une organisation pourrait donc ne pas se sentir parfaitement légitime à communiquer sur une action dont elle n’est pas absolument certaine qu’elle corresponde à l’ODD visé. Ni même que cet ODD soit compréhensible pour le grand public ou ses parties prenantes.
Une appropriation facilitée des ODD par les dirigeants et les collaborateurs serait alors nécessaire : illustrer les ODD d’exemples d’actions réussies destinées à les atteindre pour accompagner et rassurer les entreprises, disposer d’un lieu d’échanges de bonnes pratiques en la matière (notamment entre les participants au Pacte mondial des Nations Unies), d’outils communs de reporting des ODD, etc.
Un sujet mieux maîtrisé facilite l’envie de communiquer à son propos.
L’ARPP a fait tout un travail de fond afin d’éviter le « greenwashing », comment éviter le travers d’un « ODD washing » ? Quelle communication efficace, transparente et redevable sur les ODD ?
L’ARPP mène, en effet, depuis de nombreuses décennies, des actions en faveur d’une publicité loyale, véridique, saine et responsable à l’image de sa Recommandation « Développement durable » qui encadre les allégations environnementales
d’un contenu publicitaire afin de ne pas induire les consommateurs en erreur sur les réels engagements de l’annonceur en matière de Développement Durable et/ou sur les véritables qualités environnementales du produit, au-delà de la réglementation applicable, en constante évolution.
Elle permet ainsi de lutter contre le greenwashing (l’écoblanchiment), sujet particulièrement scruté, par les consommateurs de plus en plus vigilants et exigeants lorsqu’il est question d’allégations environnementales et/ou sociétales.
“COMMUNIQUER AUTOUR DES ODD CONSTITUE AINSI, ET AVANT TOUT, UN ENJEU MAJEUR EN INTERNE„
La constante progression des affaires portées auprès du Jury de Déontologie Publicitaire (JDP) sur la thématique du Développement Durable l’atteste d’ailleurs parfaitement : cela concernait 30 affaires sur un total de 76 en 2020 contre 55 sur 103 affaires en 2021. En 2022, sur 80 Avis du Jury publiés,
56 concernaient l’application de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP et le Jury a considéré les plaintes fondées pour 48 de ces affaires !
À ce dispositif s’ajoute également celui des bilans de l’ARPP réalisés conjointement avec l’ADEME intitulés « Publicité & Environnement » dans lesquels sont publiées des publicités jugées non conformes aux dispositions de la Recommandation « Développement durable » de l’ARPP (85 manquements et 53 réserves sur 1 269 publicités analysées sur les quatre derniers mois de 2020, les premiers d’une version de nouveau renforcée de la Recommandation de l’ARPP, co- construite avec la société civile au travers une autre instance associée au dispositif de régulation professionnelle, le Conseil Paritaire de la Publicité).
Un éventuel « ODD washing » serait assimilable à du « greenwashing » compte tenu des thématiques auxquelles les ODD se rapportent. Afin d’éviter cet écueil, la communication publicitaire doit alors exprimer avec transparence et justesse les actions exactement mises en œuvre par un annonceur pour répondre aux ODD, sans omettre l’ensemble du cycle de vie de son produit et/ou de son activité plus généralement.
Si des précisions sont nécessaires, elles doivent être ajoutées dans la communication, tout en restant compréhensibles, afin de permettre aux consommateurs d’opérer un choix éclairé en se reportant également à des explications complémentaires développées sur tout autre support dédié (pages d’un site, application, lieu de vente, etc.).
Il apparaît donc impératif de se faire conseiller avant toute diffusion, quel que soit le média visé.
Participer à la transition écologique est l’affaire de tous, et le greenwashing peut nuire à la modification des comportements en faveur d’une consommation plus responsable. Il en est de même pour les ODD.
Cependant, bien utilisée, la communication constitue un formidable outil pour participer notamment au rayonnement des ODD.
E. PARTENARIATS ET ALIGNEMENT
La direction générale et le département RSE, porteurs clés de l’engagement au sein des entreprises
67% des répondants ont développé un ou plusieurs partenariats dans le cadre des actions menées en faveur des ODD (58% en 2021). Les organisations de la société civile apparaissent comme des partenaires de choix dans le cadre de la mise en œuvre des actions menées en faveur des ODD. Ainsi, 1/4 (26%) des répondants conclut dans ce but des partenariats avec des organisations de la société civile. Les entreprises développent également des partenariats avec d’autres entreprises de leur secteur d’activité (19%), mais également en dehors de leur secteur d’activité (18%). Enfin, certaines entreprises établissent des partenariats avec la puissance publique ou des collectivités locales (14%).
Alignement avec l’Agenda 2030 et la feuille de route de la France
La moitié des entreprises répondantes déclare aligner leurs actions avec l’Agenda 2030 et la Feuille de route de la France. Cependant, encore 41% des entreprises disent ne pas connaître la Feuille de route établie par la France, proche du résultat de 2021 (48%).
Dans le cadre de la mise en œuvre des ODDs, la feuille de route pour la France pour l’Agenda 2030 a été établie par le ministère de la Transition écologique, sous l’égide du Commissariat général pour le développement durable, ainsi que d’une communauté d’environ 300 acteurs publics et privés pour fixer les grandes transformations à mener et les acteurs de ces changements au niveau national.
Pour plus d’informations à propos de la feuille de route de la France, consulter https://www. agenda-2030.fr/feuille-de-route-de-la-france- pour-l-agenda-2030/editorial/article/editorial-du- commissaire-general-au-developpement-durable
Alignement des ODD prioritaires avec le cœur de métier
Pour 96% des répondants, les ODD jugés prioritaires sont en ligne (41%) ou en grande partie en ligne (55%) avec leur cœur de métier.
À lire ici, page 32
Paris, le 25 janvier 2023